Martial Paoli
Récital de musique classique
J. S. Bach
W. A. Mozart
F. Chopin.
Autant prévenir les amateurs de chiens savants, Martial ne jouait pas les études de Chopin à l’âge de trois ans, n’a pas composé de concerto pour piano tandis que ses camarades de classe faisaient la guerre à leurs boutons d’acnés, et question interprétation ce n’est ni le nouveau Cziffra ni le prochain Rubinstein. Après ces quelques mises en gardes qui éloigneront ceux qui momifient la musique, nous pouvons commencer.
Martial est un pianiste de formation classique et c’est dans ce registre qu’il va enfin se produire. Je dis enfin, car je suis l’un des privilégiés à pouvoir le regarder et l’écouter découvrir, travailler puis sans cesse peaufiner une nouvelle œuvre, une nouvelle partition…
Lorsque Martial joue, il ne s’encombre pas du maniérisme poussif et autres petites simagrées dont bien trop de pianistes classiques usent pour feindre une improbable émotion ! Martial n’a nullement besoin de s’inventer une sensibilité en jouant ; Quand il est au piano, il reste sobre, digne, aucune excentricité grotesque, c’est ce genre d’artiste qui a trop conscience de la vanité de toutes choses, pour qu’une personne lui inculque les conventions et les principes des beaux salons de la "noblesse" mélomane… Il rirait à la barbe du pauvre imbécile qui lui expliquerait comment lever et reposer les mains sur les touches pour montrer au public qu’il est ému par l’œuvre jouée.
Martial cultive les nuances, c’est un perfectionniste. Il lit mille fois une partition à la recherche d’un soupir qui lui aurait échappé, il faut le voir rester immobile devant une étude de Chopin, pour comprendre à quel point la musique le passionne. Il me faut préciser que Martial aime Chopin ! Martial aime Chopin un peu comme Don Juan aime les femmes… avec une certaine frénésie ! Et de là, à penser qu’il ait déjà "aimé" plusieurs femmes tout en écoutant le "grand" Frederik, sûrement interprété par Arturo Benedetti Michelangeli (car le bougre à du goût), il n’y a qu’un pas… que je franchis.
De plus, Martial a obtenu une Maîtrise de Musicologie en écrivant un mémoire sur… devinez qui… Bravo ! C’est vous dire, si le polonais est présent dans sa vie. Martial est aussi un garçon bizarre, il oublie tout ! L’heure qu’il est, le jour de la semaine, sa montre, sa bagnole, un rencard avec une sirène, un billet gagnant du loto ! Tout, absolument tout, sauf la musique ! Il connaît un nombre prodigieux de morceaux par cœur, non pas qu’il se les rabâche, mais il ne les oublie pas c’est en "lui". Martial peut aussi vous jouer inlassablement les quarante premières notes de la « Berceuse » de Chopin, pour vous démontrer par a + b + c + d + e + z qu’il n’y a aucune virtuosité inutile et qu’on ne peut que s’émerveiller devant tant de grâces et d’élégances. Curieux personnage que ce grand bonhomme.
Martial expliquera mieux que je ne puisse le faire, son choix précis du programme et des compositeurs, programme qui soyez en sûr, sera raffiné et long en bouche comme savent l’être quelques grands vins. En venant écouter Martial vous ressortirez comblés, avec un beau sourire et une accélération cardiaque qui n’est habituellement déclanchée que par l’imminence du premier baiser. Venez même de très loin si vous aimez la musique. Bonne récompense à qui l’écoutera.
Anthony Casanova